Le Professeur Christian Perronne, ancien chef de service des maladies infectieuses et tropicales à l'hôpital Raymond-Poincaré de Garches dans les Hauts-de-Seine, était poursuivi par le Conseil National de l’Ordre des Médecins pour ses prises de position très critiques envers la politique vaccinale du gouvernement lors de l’épidémie de Covid. Dans une décision en première instance rendue le 21 octobre, le professeur est blanchi de toutes les accusations dont il faisait l’objet. Entretien avec son avocat, Maître Thomas Benages.
Le Professeur Perronne a été entendu le 13 septembre par la Chambre disciplinaire d’Ile-de-France de l'ordre des médecins. Que lui était-il reproché ?
En 2020 lors de la crise du Covid, le Conseil Nationale de l’Ordre des Médecins (CNOM) a porté plainte devant les juridictions ordinales contre ceux qui ont commis l’imprudence de s’exprimer dans les médias. Il lui était reproché d’avoir critiqué l’action du gouvernement et l’industrie pharmaceutique ainsi que l’action de certains confrères. Il lui était reproché en fait d’avoir apporté une voix discordantes sur de nombreux sujets comme la vaccination, les masques, les traitements et de ne pas avoir eu la même ligne que celle du gouvernement.
Quelles sont les motivations de la Chambre disciplinaire pour blanchir le Professeur Perronne ?
La chambre disciplinaire a suivi l’intégralité de mes arguments en défense. J’avais dit que si le professeur Perronne, qui est un infectiologue reconnu internationalement, ne peut pas critiquer l’action du gouvernement, qui peut le faire ? En France, les politiques, des syndicats, les journalistes peuvent critiquer l’action du gouvernement mais si on empêche les spécialistes les mieux à même d’apprécier une politique de santé publique de s’exprimer, cela fait courir un véritable danger sur la liberté d’expression et le débat démocratique.
La chambre disciplinaire m’a totalement suivi. La décision de la chambre est d’une limpidité absolue comme le montre cet extrait: « Dr Perronne, spécialiste internationalement reconnu comme un expert dans le domaine de l’infectiologie était le mieux à même de comprendre les enjeux de santé publique. S’il s’est exprimé dans la presse sur l’action du gouvernement et sur l’industrie pharmaceutique ainsi qu’il était légitime à le faire et en avait même l’obligation dans ce domaine qui relevait de sa compétence, il s’est borné à porter publiquement mais sans invective une voix discordante sur un sujet d’intérêt général. » Ça veut dire qu’il ne pouvait pas se taire, même si ça déplait.
Pourquoi la Chambre disciplinaire estime-t-elle que le professeur Perronne n’est pas anti-vax ?
Le CNOM a produit lors de l’audience des interviews du Professeur Perronne où il expose son point de vue sur la campagne vaccinale et la chambre disciplinaire a considéré que ce n’était pas un discours anti-vax. La chambre disciplinaire est composée de médecins et d’un magistrat de l’ordre administratif. Et le professeur Perronne a bien précisé pendant l’audience qu’il avait participé à de nombreuses campagnes de promotion de la vaccination dans le monde auprès de l’OMS, qu’il a promu la vaccination durant toute sa carrière et que là sur cette campagne il apportait une voix discordante. C’est impossible de qualifier le professeur d’anti-vax car c’est un des médecins sur cette planète qui a le plus contribué à la vaccination. C’est pour cela que pour cette campagne il était le mieux à même de faire part de son expérience et de pointer du doigt ce qui lui semblait être anormal. C’est complétement ahurissant de le traiter d’anti-vax.
"Il ne ressort d’aucune des pièces du dossier que ces propos n’entraient pas dans le cadre de la crise sanitaire et qu’à à quelconque moment il aurait appelé à la violence, ou incité à la haine ou eu un discours anti-vax "
Extrait de la décision de la Chambre disciplinaire d’Ile-de-France de l’ordre des médecins
Le professeur Perronne avait été démis de sa chefferie de service à l’hôpital de Garches : est-ce que cette sanction peut être remise en cause ?
Complétement et cela concerne le deuxième volet de l’affaire : un interne, Nathan Peiffer-Smadja a porté plainte devant le conseil de l’ordre car le professeur Perronne a cité son nom a plusieurs reprises dans les médias afin de critiquer une étude que cet interne avait produit. Ce médecin a porté plainte pour dénigrement. Et c’est cette plainte qui a motivé l’AP-HP pour suspendre de ses fonctions le professeur car il n’aurait pas été confraternel envers ce jeune praticien et que celui-ci en aurait souffert par des menaces sur les réseaux sociaux. La chambre disciplinaire a considéré qu’à aucun moment n’a été prononcé de propos discourtois et qu’il a juste été cité comme auteur d’une étude. Au contraire, le Dr Peiffer-Smadja a été sanctionné d’un avertissement par la chambre pour avoir publié des tweets insultants et injurieux envers le Professeur Perronne. La vérité est rétablie.
Comment ces décisions ont-elles été accueilles par le Professeur Perronne ?
Il est ravi. Il n’y a pas de meilleures réponses que ces décisions de la chambre disciplinaire à tous ceux qui l’ont dénigré. C’est clair et c’est net : il avait et il a toujours le devoir de s’exprimer dans la crise sanitaire.